Questions-réponses sur l'hypnose avec Delphine Bourdet
Delphine Bourdet, sophrologue et hypnothérapeute à Paris 15 répond aux questions les plus fréquentes que vous vous posez sur l’hypnose.
Quel est le but de l’hypnose ?
Tout d’abord, rappelons que l’hypnose est un état de conscience modifié que tout le monde vit au quotidien sans s’en rendre compte (cette façon d’être absorbé par un paysage, un film, une conversation… être là et ailleurs). Ce qui va changer lors d’une séance, c’est que l’état de conscience modifié va être utilisé spécifiquement pour créer un changement, une prise de conscience.
Milton Erickson, psychiatre américain (1901-1980) propose une version de l’hypnose qui s’adresse à tous. Elle est plus suggestive que directive et invite la personne à trouver en elle-même les ressources pour aller mieux. C’est ça le but de l’hypnose : accéder à nos propres trésors, à nos ressources inconscientes.
Le principe de l’hypnose c’est que vous avez en vous la solution à vos blocages. En se mettant dans un état de conscience modifié (sous auto-hypnose ou avec l’aide d’un hypno-thérapeute), vous allez pouvoir dissocier certaines réactions émotionnelles de certains stimuli.
Exemple : je dissocie l’envie de fumer, de grignoter ou de boire de l’alcool d’une situation de stress. Et vous allez pouvoir remplacer le comportement néfaste par une ressource (en réponse au stress, j’associe une respiration, un ancrage, une pensée positive, un mantra…).
Sait-on comment fonctionne l’hypnose ?
Grâce aux progrès de l’imagerie médicale, on observe clairement les réactions du cerveau sous hypnose. En 1995, l’équipe du CHU de Liège lance une étude sur la perception de la douleur et obtient des résultats intéressants : la réponse au même stimulus douloureux n’est pas la même lorsque le cerveau est sous hypnose ou non.
C’est aussi dans le très sérieux journal The Lancet que parait en 2000 une étude menée à Boston sur 241 personnes. L’hypnose démontre des bienfaits sur le niveau de la douleur, de l’anxiété ou encore de la consommation de médicaments.
L’hypnose peut-elle aider à gérer la douleur ?
Une étude de 2002 démontre que l’hypnose réduit la douleur ressentie par les patients de plus de 50% en quatre semaines. Elle permet ainsi de réduire les doses de médicaments en cas de douleurs.
Son mécanisme est simple : l’hypnose agit sur deux aspects distincts de la douleur, à savoir la sensation et l’émotion. Un caillou dans une basket va faire mal mais ne va pas entrainer de peur tandis qu’une migraine peut susciter de l’anxiété. C’est sur la douleur mais aussi l’émotion liée aux stimuli douloureux que le travail va se faire. Il est essentiel de comprendre que les composantes sensorielle et affective de la douleur sont dissociables, tant sur le plan subjectif que sur le plan neurologique.
Qu’est-ce que l’inconscient ?
Tout ce dont vous n’avez pas conscience. Tout ce que vous faites sans y penser (respirer par exemple ou encore sélectionner des informations lors d’une ballade ou encore un lapsus). La sensation que l’inconscient est un danger, une menace n’est rien d’autre que l’angoisse du moi conscient qui réalise qu’il ne peut pas tout contrôler.
Au niveau du cerveau, 3 zones sont impliquées dans les processus inconscients :
- les structures limbiques (le royaume des émotions et de la sensibilité affective),
- les zones associatives du cortex où se créent les liens entre les idées, les mots et les choses et les aires sensorielles.
Il apparait que le cerveau traite les mots comme les sensations physiques : une critique négative peut être perçue comme une gifle. Après un événement traumatisant, les personnes parfois se sentent coupées de leur corps et se mettent à avoir des douleurs dorsales…
A quoi sert l’inconscient ?
Lors de l’audition des témoins d’un accident de voitures, les personnes ne décrivent pas la même chose. Il y a tellement d’informations (auditives, visuelles, olfactives…) en permanence que nous faisons une sélection, propre à chaque personne. Dans le cas des phobies, c’est souvent un choc émotionnel tellement inconfortable que le corps le rejette et le place sur un élément extérieur. Cela peut donc être une façon de se protéger. Mais l’inconscient agit au premier degré et il est parfois bon d’éclaircir certaines réactions pour plus de cohérence.
Quelles sont les différentes techniques et donc les différentes hypnoses ?
Il y a des personnes plus réceptives que d’autres aux suggestions hypnotiques, comme il y a des personnes qui ont plus de facilités à visualiser que d’autres. En fonction de la personne, l’hypno-thérapeute va utiliser différentes méthodes (techniques de visualisation ou de dissociation ou de confusion…).
Quelles sont les différences entre la sophrologie et l’hypnose ?
La sophrologie est très proche de l’état d’hypnose et s’inspire d’ailleurs de cette dernière. Le vocabulaire est différent. Par exemple, en hypnose on appelle le fait de partir en état d’hypnose une transe, tandis qu’en sophrologie on appelle cela un état sophro-liminal. Mais c’est un état de conscience modifié assez similaire.
La sophrologie propose une partie appelée relaxation dynamique (mouvements doux issus du yoga), ainsi que des exercices respiratoires à refaire chez soi tandis que l’hypnose ne contient pas d’exercices à refaire chez soi, il n’y a pas de notion d’entrainement. L’hypnose offre de nombreuses métaphores, des techniques de confusion mentale qui vont permettre aux personnes d’aller parfois plus loin dans leur transe et accéder ainsi plus rapidement à leurs ressources. Mais la force de la sophrologie réside en sa simplicité et la possibilité d’apprendre à se détendre. C’est très réconfortant, très rassurant de savoir comment faire, comment se débrouiller seul.
Que penser des séances d’hypnose sur CD ?
C’est toujours mieux que rien et cela peut aider énormément de personnes qui n’ont pas les moyens de faire une consultation en cabinet. Cependant, lors d’une séance d’hypnose, le thérapeute rentre en résonance avec la personne, c’est-à-dire qu’il peut visualiser et retranscrire des symboles, des histoires, des métaphores, qui vont particulièrement faire écho au patient sous hypnose.
Souvent quand je pratique une séance, je ne sais pas ce que je vais raconter à la personne. Quand celle-ci est en transe, c’est comme si elle m’offrait le livre de son inconscient et moi je me contente de lire ce que je ressens. Souvent après la séance, les personnes me disent “vous m’avez raconté ma vie alors que vous ne saviez rien”. Une séance en face à face va donc avoir beaucoup plus de résonance.
Sources
Maquet P, Faymonville ME, Degueldre C, Delfiore G, Franck G, Luxen A, Lamy M. Functional neuroanatomy of hypnotic state. Biological Psychiatry, vol. XLV, n°3, février 1999
Lang EV, Benotsch EG, Fick LJ, Lutgendorf S, Berbaum ML, Berbaum KS, Logan H, Spiegel D. Adjunctive non pharmacological analgesia for invasive medical procedures: A randomised trial. The Lancet, vol. CCCLV, 29 avril 2000
Gay MC, Philippot P, Luminet O. Differential effectiveness of psychological interventions for reducing osteoarthritis pain: A comparison of Erickson hypnosis and Jacobson relaxation. European Journal of Pain, 2002