Prise en charge ostéopathique de la lombalgie
La lombalgie est une douleur dans le bas du dos, au niveau du rachis lombaire. Dans le langage courant les termes de “tour de reins” ou “mal de reins” sont souvent utilisés. Près de 4 personnes sur 5 souffrent un jour de lombalgie et les douleurs lombaires sont la première cause de handicap au travail avant 45 ans.
Dans 90% des cas, la lombalgie est fonctionnelle : tous les examens complémentaires sont normaux (radio, scanner, IRM, prise de sang…). On parle alors de “lombalgie commune”.
Causes
Selon l’INRS 1, il faudrait parler de lombalgies au pluriel car :
[…] les lombalgies c’est : raideur au réveil, lourdeur, douleurs diffuses, douleurs franches et précises, lumbago, impression d’instabilité… Ces formes multiples ne sont toutefois pas représentatives de la gravité de la lésion à l’origine de la douleur.
Il faut faire la différence entre 3 types de lombalgie :
- Les lombalgies avec compression radiculaire (5 à 15%). Sur le nerf crural on parlera de cruralgie et sur le nerf sciatique on parlera de sciatalgie,
- Les lombalgies symptomatiques avec pathologies sous-jacentes (1 à 5%) dont le suivi et le traitement seront particuliers.
- Les lombalgies communes sans pathologie à l’origine de la douleur : c’est cette lombalgie que l’on va détailler dans cet article.
Concernant les examens d’imagerie (radio, IRM…), il n’y a pas forcément d’association entre une anomalie dans les imageries et la survenue de lombalgie : les anomalies d’imagerie sont aussi répandues chez les patients asymptomatiques que chez ceux présentant des douleurs lombaires. D’ailleurs, entre 40% et 50% des personnes qui n’ont pas de douleur dans le bas du dos présentent des dégénérescences et arthrose sur leur radio 3.
Les causes de survenue d’une lombalgie commune peuvent être très variées (liste non exhaustive) :
- Faux mouvement, mauvaise position ou mauvaise ergonomie pouvant provoquer contractures musculaires et blocage articulaire,
- Effort inhabituel, sur-sollicitation du corps et surmenage physique,
- Psychosocial : somatisation, stress, angoisse…
- Viscérale : constipation, adhérence cicatricielle, menstruation…
- Faiblesse des muscles du dos et des abdominaux par manque d’exercices physiques,
- Vibrations : machines agricoles, tondeuses…
Durée
En général, la lombalgie se résout en 2 semaines mais les récidives sont fréquentes (73% des personnes auront une récidive de lombalgie dans les 12 mois) 3. Le paracétamol est inefficace comme traitement et il ne réduit pas la durée du mal de dos (voir l’article sur la lombalgie et le paracétamol). Le risque majeur de la lombalgie est donc son passage à la chronicité avec son lot d’arrêts maladie et d’incapacité physique.
On parle de lombalgie :
- aiguës : quand elle dure moins de 6 semaines
- subaiguë : quand elle dure entre 6 semaines et 3 mois
- chronique : quand elle dure plus de 3 mois
Traitement ostéopathique
Les douleurs lombaires sont les premiers motifs de consultation ostéopathique 4. Une méta-analyse de 2005 4 montre que l’ostéopathie réduit considérablement les lombalgies à court et moyen terme et conclut que ses effets persistent pendant au moins 3 mois. Une autre étude conclut que ses effets peuvent perdurer pendant 1 an 5. Elle est efficace dans les douleurs lombaires aiguës 6 et chroniques 7 8 et permet une diminution de l’utilisation des médicaments (antalgique, anti-inflammatoire, décontractant musculaire…) 8 9 10.
Prévention
- Une bonne tonicité des muscles (dos et sangle abdominale) est essentielle pour préserver votre dos. Une séance hebdomadaire de sport 11 12 13 (avec échauffements et étirements) est recommandée : piscine, pilates, marche à pied ou marche nordique, yoga, vélo… Il ne faut pas tomber dans ce que l’on appelle le cercle vicieux de la douleur :
Bien entendu, il faudra revoir l’ergonomie : que ce soit l’agencement du poste de travail au bureau ou les mouvements lors de la manutention, du jardinage ou des gestes quotidiens… Il faut toujours avoir les épaules à l’aplomb du bassin et des hanches (et donc éviter de se courber / se pencher en avant) et toujours utiliser ses jambes en les fléchissant pour ramasser quelque chose au sol.
Bien que les semelles orthopédiques n’aient pas montré d’efficacité 14 dans le traitement et la prévention des douleurs lombaires. Cependant, un certain nombre de mes patients se sont vu améliorés par des semelles orthopédiques après un bilan de posturologie. Je pense que cette piste est à explorer pour les lombalgies chroniques et que les résultats peuvent être concluants quand l’indication est bien portée.
La ceinture lombaire soulage la douleur lombaire en période de crise, mais protège aussi les disques lors du soulèvement de charge si elle est utilisée avec les bons gestes 15.
Un IMC élevé est largement corrélé au risque de lombalgie. Un régime en cas de surpoids protégera donc votre dos des douleurs 16.
Le tabagisme est relié à un risque accru de lombalgie : arrêtez le tabac et vous aurez un facteur de risque en moins pour les douleurs lombaires (en plus du cancer…) 17 18 19.
Le lien entre troubles du sommeil et douleur lombaire est évident, mais on ne sait pas si les troubles du sommeil sont une cause ou une conséquence des douleurs lombaires 20… Selon une méta-analyse, la qualité de la literie a un impact direct sur les douleurs lombaires (et du dos en général) et il est montré que les matelas durs ou fermes réduisent le diagnostic de lombalgie. Les matelas en mousse, quant à eux, devraient être évités 21.
Vidéo “Mal au dos : C la Santé” 22 :
La lombalgie commune est fréquente mais très invalidante. De nombreux facteurs influencent sa survenue : ce sont autant d’axes permettant de réduire les douleurs voir de les faire disparaître.
Sources
INRS. Les lombalgies. 2010 ↩ ↩2
Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé, Service des recommandations et références professionnelles. Diagnostic, prise en charge et suivi des malades atteints de lombalgie chroniques Décembre 2000 ↩
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Emission C la santé - Sujet : mal au dos. Émission coproduite par l’AP-HM et LCM présentée par Camille Bosshardt. Invités : Dr Pierre-Olivier PINELLI (chirurgien orthopédiste) et Pr Jean NAUDIN (psychiatre) ↩